Les 4 capitaux de Pierre Bourdieu
Pierre Bourdieu constate que les individus ne sont pas interchangeables. Pour expliquer cela, il a élaboré toute une théorie dont les quatre grands capitaux occupent le centre. Les individus se distinguent de part leur possession inégale de capitaux. Ils ont des volumes différents de capitaux mais aussi une répartition différente des différents capitaux au sein de leurs aptitudes.
Le capital économique est le capital premier. Il se compose de l’ensemble des richesses d’un individu (revenus, patrimoine).
Le capital culturel est le plus important pour Pierre Bourdieu. Il s’agit de l’ensemble des savoirs, des savoir-être (habitus : capacité d’un individu à se positionner), des diplômes et des biens culturels possédés par un individu.
Le capital social est le réseau de relations et connaissances dont dispose un individu et sa famille et qu’il peut activer pourobtenir des informations déterminantes pour avoir un stage, un emploi, etc.
Le capital symbolique qui valide un certain prestige social correspondant au rayonnement des individus dans la société. Il légitime la possession des autres capitaux. Il diffère en fonction de l’importance de chacun dans la prise de décision notamment.
Finalement, la dotation de chaque individu dans les différents capitaux est déterminante. Par exemple, pour réussir en politique, il peut être préférable de disposer d’un fort capital social. D’autre part, le monde de l’art sera peut-être plus accessible si l’on dispose de capital culturel. Ce n’est pas seulement le volume global du capital qui est déterminant mais aussi sa composition.
Les principaux enjeux des politiques éducatives depuis 1950 en France
I. Le processus de massification scolaire…
Le processus de massification scolaire renvoie à différents principes. L’école est une institution dont l’objectif est d’inculquer un certain nombre de savoirs, de savoir-faire. Elle vise l’épanouissement des jeunes mais aussi l’obtention de diplômes afin qu’ils s’insèrent sur le marché du travail.
A. Les principes à l’origine de ces politiques
Plusieurs principes sont à l’origine de ces politiques :
– L’égalité des droits : l’école est publique, laïque, obligatoire et gratuite.
– La méritocratie qui veut que chaque personne puisse exercer le métier qu’il souhaite en fonction des efforts qu’il fournit : plus je fais d’efforts, plus je peux aller loin.
– Cette compétition est considérée juste si on respecte le principe de l’égalité des chances. Cela admet que l’on mette en place des dispositifs afin de permettre à tous d’avoir les mêmes opportunités ou chances au départ, indépendamment de caractéristiques telles que l’origine sociale ou ethnique, le sexe, etc., qui sont des caractéristiques discriminantes.
B. Quelques politiques emblématiques
La loi Berthoin, en 1959, rend la scolarisation obligatoire de 13 à 16 ans.
La loi Haby, en 1975, dite loi du collège unique, entend accueillir de plus en plus d’élèves dans les collèges, avec les mêmes programmes pour tous.
La mise en place du bac professionnel, en 1985, suit la même logique : permettre à tous d’accéder au bac. Cela répond à l’enjeu de l’époque qui était que chaque individu issu d’une même cohorte d’âge ait le bac à hauteur de 80 %.
C. Des résultats encourageants
Le taux de scolarisation en 2016 des personnes de 16 ans était de 94,3 %. C’est un chiffre très élevé. Pour le taux de scolarisation des personnes de 18 ans, il est inférieur à celui de celles de 16 ans et est de 77 %. Le taux de scolarisation des personnes de 21 ans est de 44 %. Il y a une baisse, évidemment, en fonction de l’âge mais on constate que c’est surtout au milieu des années 1980 qu’il y a eu une forte augmentation du taux de scolarisation.
On peut également s’intéresser au taux d’obtention du bac. Dans les années 1960, 25 % des individus d’une même cohorte d’âge avait le bac. 30 ans plus tard, dans les années 1990, 60 % des individus issus d’une même classe d’âge avait le bac. Aujourd’hui, plus de 80 % des individus d’une même classe d’âge ont le bac.
On peut enfin s’intéresser aux inscriptions dans l’enseignement supérieur. Le ministère de l’Enseignement supérieur révèle un certain nombre de chiffres. Par exemple, aujourd’hui il y a 8 fois plus d’étudiants inscrits par rapport aux années 1960. A partir de 2000, on constate qu’il y a une augmentation de 15 % du nombre d’étudiants. On remarque bien qu’il y a de plus en plus d’étudiants dans le supérieur.
On constate donc bien ici un processus de massification scolaire, qui correspond à l’augmentation du nombre d’écoliers et d’étudiants en France.
II. …ne semble pas avoir permis un réel processus de démocratisation scolaire
Ce processus de massification scolaire ne semble pas avoir permis un réel processus de démocratisation scolaire. Massification et démocratisation ne se sont pas des synonymes. On peut définir le processus de démocratisation scolaire comme était le phénomène selon lequel chaque individu a de plus en plus de chances d’accéder aux formations souhaitées indépendamment de son origine sociale.
A. L’élévation du niveau d’étude ne profite pas à tous
Le ministère de l’Enseignement supérieur a dévoilé une enquête où il s’est intéressé à une cohorte d’individu qui était en sixième en 1980. On observe que 41 % des jeunes dont le chef de famille est cadre occupent une profession intellectuelle supérieure et ont un niveau bac + 5. Pour les enfants dont le père est ouvrier non qualifié, ils ne sont que 4 % à parvenir au même niveau, 9 % si le père est employé.
Pour les enfants dont le père est ouvrier non qualifié, ils sont 80 % à avoir au maximum le bac contre 24 % seulement pour les enfants d’enseignants.
Il apparaît donc qu’il y a des inégalités de trajectoire scolaire en fonction de la PCS d’origine du chef de famille, en l’occurrence ici, du père.
Des dispositifs ont été mis en place. On peut penser aux politiques dites de discrimination positive, comme les conventions d’éducation prioritaire (CEP) pour intégrer Sciences Po Paris ou des écoles d’ingénieurs : des candidats sont sélectionnés en dehors du concours officiel grâce à des entretiens et cela est réservé à des personnes issues de milieux plutôt défavorisés. Néanmoins, on voit qu’il y a des inégalités.
B. Une démocratisation ségrégative
A vouloir faire en sorte qu’il y ait un processus de massification scolaire, on aboutit peut-être à un processus de démocratisation ségrégative. Par exemple, créer le bac professionnel, c’est créer une filière professionnelle. Il y a aussi une filière technologique qui existe depuis bien longtemps. Or, les individus dès le lycée vont être hiérarchisés en fonction de leur parcours. Il est des parcours qui sont beaucoup plus faciles ou qui sont moins prestigieux et ces parcours sont peu perméables entre eux.
Les individus issus de milieux plus défavorisés sont surreprésentés sur les parcours de type technologique ou professionnel, et cela se répercute également dans le supérieur avec le clivage études courtes versus études longues. Il n’y a pas une réelle démocratisation scolaire.
Conclusion
On observe bien un processus de massification scolaire nette, des résultats encourageants. On peut parler d’une petite démocratisation scolaire. Mais il faut être vigilant à cet égard. L’État doit mettre en place davantage de politiques volontaristes pour que ce processus de démocratisation scolaire s’amplifie. On peut, pour terminer, prendre l’exemple de dédoubler les classes de CP de sorte que l’enseignement soit le plus égalitaire pour tous, dès le plus jeune âge.