Histoire évolutive de la lignée humaine
Histoire évolutive de la lignée humaine
Les Homininés sont tous les représentants de la lignée humaine, donc tous les individus actuels comme Homo sapiens mais aussi toutes les espèces fossiles qui vont appartenir davantage aux ancêtres d’Homo sapiens, donc l’homme actuel, plutôt qu’à ceux du chimpanzé. L’ancêtre commun à l’homme Homo sapiens et au chimpanzé est daté de 6 à 7 millions d’années.
I. Étude anatomique du groupe des Homininés
Comment peut-on savoir, lorsqu’on trouve un fossile, que l’on est en présence d’un ancêtre d’être humain et non de chimpanzé ?
Il existe trois critères :
– Volume crânien important : si ce fossile présente un volume crânien important alors nous pouvons être en présence d’un Homininé. Une réduction du prognathisme : au lieu d’être avancée, la mâchoire est réduite. Chez Homo sapiens le prognathisme est quasiment absent. On a également une avancée du trou occipital plutôt en arrière chez le chimpanzé, il va se ré-avancer chez Homo sapiens.
– Bipédie permanente. Pour savoir si notre fossile était un bon bipède, on peut se fier au bassin. Un bassin haut et étroit marque une bonne bipédie, de même qu’un fémur incliné par exemple. Au niveau de la colonne vertébrale, le fait d’avoir quatre courbures indique également la présence d’une bipédie.
– Mâchoire en forme de V alors qu’elle est en forme de U chez le chimpanzé, mais aussi une réduction des canines. Si on trouve des canines proéminentes on peut penser qu’on n’est pas en présence d’un Homininé mais plutôt d’un ancêtre du chimpanzé. En effet, chez les Homininés, les canines sont réduites au format des incisives.
En plus de ces critères morpho-anatomiques, on va également avoir des indices quant à la production d’outils.
II. La production d’outils
Si on trouve près d’un fossile des outils ou des traces d’activités culturelles, des peintures par exemple, on peut rattacher ce fossile à la lignée humaine. Il faut faire très attention car la production d’outils n’est pas le propre de l’espèce humaine. Les chimpanzés aussi utilisent des outils. Mais dans la lignée humaine, seuls les Homininés produisent des outils à l’aide de la fabrication d’autres outils.
Parmi tous ces outils, citons le biface. Le biface est un silex qui a été taillé sur ces deux faces. Il est apparu il y a 1,6 million d’années et s’est répandu de l’Afrique vers l’Europe. Les plus anciens bifaces en Europe datent de 800 000 ans. On en a retrouvé par exemple à Saint-Acheul près d’Amiens.
III. L’arbre phylogénétique de la lignée humaine
Les différents critères morpho-anatomiques que l’on vient de voir permettent de créer l’arbre phylogénétique de la lignée humaine, c’est-à-dire de ces Homininés. En effet, on va se baser sur des caractères dérivés.
Un caractère existe sous deux états :
– un état ancestral, par exemple un pouce non opposable chez les non primates,
– un caractère dérivé, par exemple un pouce opposable chez les primates.
On compare pour cela ces caractères, ancestral ou dérivé, par rapport à un extra-groupe. Par rapport à la lignée humaine, on peut prendre comme extra-groupe le chimpanzé. En effet, le chimpanzé est un primate, mais qui n’est pas un Homininé. Avec ces comparaisons, quand on va retrouver un fossile, on va pouvoir essayer de le rattacher à la lignée humaine. Ainsi, on peut remarquer que les trois espèces qui sont les plus proches sont Homo sapiens (espèce actuelle d’Homininés), Homo neanderthalensis et Homo denisovensis.
Le problème de cet arbre phylogénétique, c’est qu’on a parfois des données parcellaires, qui sont fragmentées. Par exemple sur Orrorin, on ne connaît pas son crâne, on ne l’a pas retrouvé. On peut également avoir des fossiles qui sont très déformés. Si on prend Sahelanthropus tchadensis, son crâne est tellement déformé qu’une reconstitution numérique a eu lieu, et ces reconstitutions font toujours débat actuellement.
Histoire du genre Homo
Histoire du genre Homo
Dans la lignée humaine, du groupe des Homininés, on va retrouver le genre Homo. Le genre Homo regroupe des espèces fossiles et notre espèce Homo sapiens, la seule actuelle. Comment définir d’abord ce genre Homo, ces espèces humaines ?
I. La définition du genre Homo
On remarque l’existence de plusieurs caractéristiques mais avant pour pouvoir comparer ces Homo, on va les comparer à un extra-groupe, c’est-à-dire à un individu qui est Homininé mais qui n’est pas un Homo. Dans cet exemple c’est l’Australopithecus afarensis, que vous connaissez peut-être sous le nom Lucy. On va comparer le volume crânien, le prognathisme, c’est-à-dire le degré d’avancement de la mâchoire (lorsque ce dernier est réduit la face est dite plate) et la bipédie.
Australopithecus afarensis | Homo erectus | Homo neanderthalensis | Homo sapiens | |
Volume crânien moyen (cm3) | 450 | 1100 | 1500 | 1350 |
Prognathisme | important | léger | léger | absent |
Bipédie |
probablement permanente pas de course |
permanente course |
permanente course |
permanente course |
Chez l’Australopithecus afarensis, on a un volume moyen de 450 cm3, un prognathisme important et une bipédie probablement permanente. La bipédie était très certainement très chaloupée et ne permettait pas la pratique de la course. Avec cet Homininé qui n’est pas un Homo on va pouvoir déterminer les caractéristiques du genre Homo. Ainsi on remarque que chez Homo erectus, Homo neanderthalensis, Homo sapiens, on a une augmentation du volume crânien moyen. Attention ne retenez pas que l’augmentation de ce volume crânien est une finalité évolutive, en effet, on a un volume crânien qui est moindre que celui de Néandertal et pourtant notre espèce est la seule espèce humaine actuelle. L’espèce humaine Homo neanderthalensis n’existe plus, elle a disparu il y a 40 000 ans environ.
Concernant le prognathisme, contrairement à l’Australopithecus, il est très léger chez les deux Homo neanderthalensis et erectus et par contre il est absent, la face est plate, chez l’espèce humaine.
Enfin, on a une bipédie qui est permanente et une pratique de la course. Ces caractéristiques, augmentation du volume crânien, réduction voire absence du prognathisme, et bipédie permanente, sont donc des caractères qui vont définir le genre Homo.
II. Dénisoviens, Néanderthaliens et Homo sapiens
On peut extraire de l’ADN de certains fossiles, par exemple d’un fossile de molaire quand on en retrouve un et faire des comparaisons par exemple avec l’ADN d’Homo sapiens. Cela nous permet de recréer un arbre phylogénétique avec les plus proches parents Homo neanderthalensis et Homo denisovensis comparés à notre espèce Homo sapiens. On peut également utiliser d’autres espèces pour faire ces comparaisons. L’étude de l’ADN nous permet d’avoir des informations là où on a des informations trop parcellaires au niveau des fossiles. En effet, on n’a pas forcément des fossiles complets des différentes espèces et ces études nous permettent de faire des comparaisons.
Le problème sur Homo sapiens, Homo neanderthalensis et Homo denisovensis, c’est qu’il y a eu de nombreux échanges génétiques : entre Homo sapiens et Homo neanderthalensis mais aussi des échanges entre Homo sapiens et Homo denisovensis et entre Homo neanderthalensis et Homo denisovensis. On le sait car on retrouve tout simplement dans les populations actuelles d’Homo sapiens des traces d’ADN d’homme de Néandertal.
En effet, les Eurasiens contiennent dans leur génome entre 1 et 3 % de gènes néandertaliens. Si on regarde le génome des Papous de Nouvelle-Guinée par exemple, ils vont avoir jusqu’à 5 % de génome constitué d’Homo denisovensis. On a également retrouvé en 2018 en Sibérie un fragment d’os dont l’analyse génétique a révélé qu’il s’agissait d’un hybride avec une mère néandertalienne et un père Denisovia.
Ces analyses génétiques stipulent que l’homme de Néandertal est l’homme de Denisovia dériveraient peut-être d’Homo erectus. Ce qui est sûr, c’est qu’Homo sapiens est apparu il y a 300 000 ans et a cohabité avec Homo neanderthalensis et Homo denisovensis et qu’il y a eu de nombreux métissages. C’est pour cela que l’on retrouve dans notre génome actuel des traces de ces métissages.
III. La transmission de caractères non génétiques
Il y a aussi des transmissions de caractères qui ne sont pas génétiques. On peut transmettre le langage, par exemple. Nous parlons français : c’est un comportement, une langue qui nous est apprise. Dans d’autres pays, on parle d’autres langues.
Il y a aussi la culture alimentaire : la manière dont vous vous alimentez est différente de celle d’un élève à l’autre bout du monde parce que nous avons un héritage culturel. Il y d’autres caractères comme le microbiote : au niveau de vos intestins vivent différents microorganismes, des bactéries par exemple, et si l’on étudiait le microbiote de votre intestin et si on le comparait avec celui d’un élève italien ou un élève du Burkina Faso, on observerait que ce ne sont pas du tout les mêmes espèces de bactéries qui habitent les intestins. C’est par exemple ce qui permet aux Japonais de digérer les sushis puisqu’ils possèdent dans leur microbiote des bactéries qui sont capables de digérer l’algue qui entoure les makis, alors que pour nous Européens, c’est plus difficile de la digérer.
Il y a ensuite la production d’outils. On sait que la construction d’outils n’est pas le propre de l’espèce humaine puisque par exemple le Chimpanzé utilise des outils, cependant c’est la seule espèce qui fabrique des outils à partir d’autres outils. On peut retrouver, au niveau de l’espèce humaine, différents outils, des bifaces, des choppers, qui ont été par exemple utilisés il y a 1,6 million d’années, les plus anciens en Europe sont datés d’à peu près 300 000 ans. Ils sont attribués à Homo ergaster. Quand on retrouve des outils plus fins, des pointes, des racloirs par exemple, on sait que ce sont des outils qui ont été confectionnés par Homo sapiens ou l’homme de Néandertal par exemple.
Il faut bien prendre conscience qu’il y a des caractères génétiques mais aussi des caractères non génétiques qui nous sont transmis.