La correspondance

La correspondance est un genre d’écriture quotidien, mais c’est aussi un genre de l’écriture de soi, un genre littéraire, et à ce titre on peut en observer l’histoire et les caractéristiques de style et de registre.

 

I. Caractéristiques de la correspondance

 

La correspondance est un texte écrit pour quelqu’un. Le texte est adressé, on sait à qui on parle clairement. Il est adressé soit à une, soit à plusieurs personnes. Le fait de s’adresser à plusieurs personnes est un peu moins commun, mais c’est le cas des mails collectifs ou des SMS à plusieurs. C’est aussi pratique lors de correspondance manuscrite, à savoir que l’on peut très bien adresser une lettre à une famille ou envoyer une carte postale, par exemple. On trouve ces dispositifs dans l’histoire de la correspondance, et dans les romans épistolaires.

La correspondance est soit réelle, soit fictive. Ce peut être une lettre qui a vraiment été écrite pour être lue par des gens qui existaient en vrai. Ou ce peut être une lettre écrite par un personnage irréel ou pour quelqu’un d’irréel. Parfois, elle s’insère même dans un roman où toutes les lettres sont fausses.

 

II. Histoire littéraire : le roman épistolaire (terme utilisé pour désigner les lettres)

 

Dans l’histoire littéraire du roman épistolaire, certains auteurs ont choisi de faire semblant d’écrire des lettres pour ensuite les assembler dans un recueil, faire penser au lecteur qu’il s’agit d’une vraie correspondance et la faire lire comme étant véridique. Il y a deux sources d’inspiration pour ce roman épistolaire : Héroïdes d’Ovide et la correspondance d’Abélard et Héloïse.

Le texte d’Ovide est un texte de l’Antiquité latine-romaine qui est une correspondance fictive. Dans les Héroïdes, Ovide choisit de faire parler les femmes de la mythologie, de les faire déplorer la perte de leur époux ou l’absence de celui qu’elles aiment et de les faire pleurer sur leur séparation. Il s’agit toujours de se plaindre de quelque chose. Il s’agit du registre littéraire élégiaque. Toutes ces femmes de la mythologie vont prendre la parole et s’adresser à celui qui leur manque, celui qui les a trahis, etc.

Dans la correspondance d’Abélard et Héloïse, on a une correspondance réelle car ce sont des personnages qui ont réellement existé au XIe siècle et qui ont laissé la première correspondance amoureuse du royaume de France (écrit en latin). Néanmoins cette correspondance a été beaucoup lue dans les siècles suivants, jusqu’à aujourd’hui et a inspiré beaucoup d’auteurs.

Le roman épistolaire commence à être inventé au XVIIe siècle, avant cela on reste dans de la correspondance réelle. Par exemple, la Marquise de Sévigné est très connue pour les lettres adressées à sa fille dont elle était séparée géographiquement. Comme elle était très attachée à sa fille, elle lui écrivait très souvent et elle faisait la chronique de ce qui se passait à la cour qu’elle fréquentait dans son propre château. Elle lui adresse des lettres réelles. La Marquise de Sévigné était auteure parce qu’elle a écrit des lettres qui sont considérées comme de haute qualité de style et importantes pour connaître son époque.

Exemple de correspondance fictive (même s’il y avait des doutes au départ) : Lettres d’une religieuse portugaise, c’est le titre donné à un ensemble de lettres qu’on attribue à Guilleragues, mais qui était présenté comme anonyme et réel. On a mis un certain temps avant de se rendre compte que cette religieuse portugaise n’existait pas et que c’était une invention.

Au XVIIIe siècle, c’est l’essor du genre épistolaire. On garde souvent deux titres en mémoire : le roman de Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse, en référence à Abélard et Héloïse. Il s’agit bien d’une correspondance fictive. On a aussi Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos.  C’est un texte un peu complexe, qui est l’exemple type du roman épistolaire du XVIIIe siècle. C’est aussi une correspondance fictive.

 

III. La situation d’énonciation : qui parle à qui dans le roman épistolaire ?

 

Dans ces correspondances, les textes sont adressés à des personnes en particulier. On sait que dans Les Liaisons dangereuses, Valmont, le personnage principal, écrit à Madame de Merteuil. Mais cette lettre n’est pas adressée au lecteur, et pourtant c’est lui qui la lit en réalité, car la marquise de Merteuil n’existe pas. Il y a une situation de supercherie : le lecteur lit cette lettre comme un intrus, comme quelqu’un qui aurait découvert par hasard ces lettres. C’est un peu comme si on arrivait à trouver le mot de passe d’une messagerie et qu’on lisait tous les échanges de mails de quelqu’un : c’est la situation dans laquelle se place le roman épistolaire. On est un espion ou quelqu’un qui n’aurait pas le droit de dire ce qu’il lit.

C’est le même effet que la correspondance soit fictive ou réelle, car quand on lit des correspondances d’écrivains aujourd’hui, on a accès à des textes qui ne devraient pas être accessibles. Nous sommes là en tant qu’intrus qui découvrent des secrets et confidences qui ne nous étaient pas destinées au départ.

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