Histoire des genres de l'argumentation - Voltaire
Voltaire et le conte philosophique, Candide
A. Contenu
Candide, conte philosophique de Voltaire, constitue un apologue, c’est-à-dire un récit qui sert autant à plaire qu’à instruire. Candide est l’histoire d’un jeune homme extrêmement naïf, qui découvre dans ses voyages les atrocités du monde, comme l’esclavage par sa rencontre avec le « nègre de Surinam », l’intolérance religieuse par les autodafés de l’Église, l’hypocrisie des gens qui l’entourent etc.
Candide finit par rentrer chez lui, désillusionné mais aussi plus réaliste, pus conscient des réalités qui l’entourent. Il rentre chez lui dit Voltaire pour « cultiver son jardin ». Au sens littéral « cultiver son jardin » c’est cultiver la terre, faire pousser des légumes et des plantes, mais au sens métaphorique du terme, cultiver son jardin c’est également se cultiver personnellement, apprendre, s’instruire. Le message de Voltaire est non seulement qu’il faut être capable de se cultiver personnellement, mais également humblement : l’homme doit accéder à un bonheur simple, à la mesure de ce qu’il est.
B. Forme
La forme du conte est une forme particulière en littérature, puisqu’il s’agit de récits farfelus dans lesquels les personnages ne sont pas réalistes mais invraisemblables. Les aventures dans Candide se succèdent alors à un rythme totalement effréné qui entraînent le lecteur et qui suscitent intérêt et plaisir.
Les personnages de Candide et des contes philosophiques en général sont des stéréotypes : des personnages qui n’ont pas de profondeur intérieure mais se réduisent à une seule caractéristique essentielle. Le personnage principal de Candide se réduit ainsi à sa candeur, sa naïveté.
C. Procédés
Il y a dans Candide un procédé continuellement présent qui est l’ironie. Voltaire l’utilise pour attaquer l’optimisme qui est tout au long du livre proféré par Pangloss, le mentor de Candide, qui affirme que « tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes », alors que rien ne va et que l’on vit dans un monde impitoyable.
Histoire des genres de l'argumentation - Diderot
Diderot, L’Encyclopédie
L’Encyclopédie de Diderot a pour but de lutter contre l’obscurantisme. L’obscurantisme correspond au manque de savoir, de connaissances, de compréhension du monde, à une époque où beaucoup n’étaient pas éduqués et se tournaient vers des superstitions, à l’instar de celles entretenues par l’Église. Le but de L’Encyclopédie est donc bien de faire reculer l’obscurantisme par les « lumières » des connaissances, des philosophes des Lumières au XVIIIe siècle.
Le principe de L’Encyclopédie est donc avant tout de recenser les savoirs dans tous les domaines : les mathématiques, les sciences naturelles, l’histoire, l’économie, la religion, la littérature, etc. Cela a ainsi donné lieu à 17 volumes, 60 000 articles et a associé plus de 200 collaborateurs, puisque Diderot n’a évidemment pas écrit seul L’Encyclopédie mais s’est appuyé sur d’autres philosophes tels que Voltaire, Rousseau, d’Alembert. Il s’agit au total de plus de vingt ans de travail.
L’Encyclopédie remet ainsi en cause les différentes institutions politiques et religieuses de l’époque, telles que la monarchie absolue et le christianisme. L’Encyclopédie n’hésite pas non plus à critiquer les dérives de la société du XVIIIe siècle, entre autres la censure, la partialité de la justice pénale et l’esclavage.
Histoire des genres de l'argumentation - Montesquieu
Montesquieu, Lettres persanes
A. Forme
L’œuvre de Montesquieu, Lettres persanes, se compose de lettres qui se succèdent les unes à la suite des autres, et qui forment une histoire. Le but de ce procédé original est tout d’abord d’éviter la censure. Montesquieu avait en effet affirmé à l’époque que ces lettres étaient vraies, trouvées dans un grenier, et qu’il avait simplement entrepris de les faire publier. L’auteur a ainsi pu faire une critique acerbe, assez violente de son époque, sans s’exposer à la censure.
La forme de lettres permet également de conférer un message réaliste au roman de Montesquieu, puisque celui-ci souhaitait non pas faire croire qu’il s’agissait d’une histoire inventée, mais bien de quelque chose qui s’était effectivement passé.
B. Contenu
Les Lettres persanes sont l’histoire de deux Persans, Usbek et Rica, qui visitent la France alors qu’ils ne connaissent rien à l’Europe et à ses institutions. Ils écrivent alors à leurs amis, leurs proches en Perse pour leur faire part de leurs impressions.
Ils s’étonnent ainsi de certaines coutumes de l’époque et n’hésitent pas à en souligner le caractère ridicule, absurde. Ils se moquent ainsi de la mode de l’époque, décrivant les perruques que les nobles portaient à l’époque, tellement grandes que certaines femmes ne pouvaient pas passer à travers certaines portes.
Usbek et Rica décrivent et critiquent également les pouvoirs de l’Église et du roi. Les deux personnages se demandent ainsi comment ces « magiciens », à propos des puissants, sont-ils capables d’asservir tout un peuple sans que celui-ci ne cherche à se rebeller. Les Lettres persanes constituent ainsi une véritable critique des mœurs contemporaines de l’époque.
Ainsi, les philosophes des Lumières ne font plus seulement que critiquer la société, contrairement aux moralistes du XVIIe siècle, mais cherchent à proposer de véritables alternatives.
Histoire des genres de l'argumentation - Rousseau
Rousseau et ses discours
Le discours est un genre particulier. Au XVIIIe siècle, l’académie de Dijon proposait régulièrement des questions. Tout volontaire pouvait alors envoyer une réponse à la question, un discours, afin de gagner un prix. Lors d’un de ces concours, l’académie demanda alors « quelle est l’influence des arts sur les mœurs des hommes ? », question à laquelle Rousseau répondit par son célèbre Discours sur les sciences et les arts.
En opposition à Voltaire (alors très influent) qui prône la société de consommation et qui est favorable au progrès ; Rousseau avance que le luxe et la civilisation corrompraient l’homme, qui serait alors bien meilleur à l’état de nature.
Un autre discours très célèbre de Rousseau est son Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes. Rousseau commence par y exprimer que l’homme est bon à l’état de nature, autrement dit que sans la civilisation l’homme est bien meilleur. L’homme serait ainsi altéré par la société et son organisation, par ses lois corruptrices.
Rousseau critique notamment le concept de propriété. Il affirme que le premier homme qui a planté le premier bâton pour créer le premier enclos a corrompu la nature humaine. Selon Rousseau, en effet, dans une société où la propriété n’existe pas, tout appartient à tout le monde et tous vivent alors en harmonie. Rousseau imagine alors, à la fin de son discours, un homme à l’état de nature, un homme qui vivrait dans les arbres, qui mangerait des glands, qui serait ainsi en totale solitude, hors de la société. Il décrit pourtant cet homme comme heureux, notamment parce qu’il se satisfait du minimum, de ce que la nature lui offre.
Les Lumières
Période
Le mouvement des Lumières s’étend sur tout le XVIIIe siècle. Il y a quelques prémices au XVIIe siècle avec le libertinage érudit. Le mouvement s’arrête avec la Révolution française, laissant place à de nouvelles idées révolutionnaires.
Définition
Le mouvement des Lumières est un mouvement intellectuel et artistique, qui promeut la raison contre la foi. Son but est d’augmenter les connaissances en s’appuyant sur la raison et en rejetant l’autorité de l’Église qui impose certains dogmes, certaines vérités ou conduites, en refusant à tous le droit d’examiner pour soi-même la validité d’une opinion.
C’est aussi la croyance dans le progrès et dans la technique : par exemple dans L’Encyclopédie de Diderot, on trouve certaines illustrations qui détaillent le fonctionnement de machines, les étapes d’une dissection, etc. C’est aussi une volonté de démocratisation de la connaissance. Le but est que chacun puisse refaire un cheminement intellectuel, et puisse être convaincu pour soi-même de la validité ou de la fausseté d’une opinion. Il faut rendre chacun responsable dans la constitution de son savoir, et ne pas le limiter aux classes nobles ou savantes.
Il y a donc une opposition entre les Lumières, qui symbolisent le savoir, et l’obscurantisme, qui traduit la volonté de rester dans l’ignorance (volonté de l’Église à l’époque).
Auteurs et oeuvres emblématiques
– Diderot (et d’Alembert) sont les auteurs de L’Encyclopédie, l’oeuvre principale des Lumières. Cette encyclopédie était un projet de diffusion du savoir à la fois large et spécifique (technique et scientifique). On y trouvait des détails très précis sur le fonctionnement de certaines machines ou instruments dessinés sur des planches illustrées.
– Voltaire se distingue par le Dictionnaire philosophique, oeuvre dans laquelle il donne son opinion sur différents sujets, à travers des articles de dictionnaires (même ambition que L’Encyclopédie : diffuser le savoir). On y trouve notamment un article de dénonciation de la torture.
– Rousseau, a écrit Émile ou De l’éducation. Cette oeuvre suit toute l’éducation d’Émile, un enfant fictif, de sa naissance à l’âge adulte. Il promeut une vision de l’éducation très moderne pour l’époque : laisser l’enfant faire sa propre expérience, découvrir les choses par lui-même, et devenir l’acteur de son savoir.
Bonus
Pour comprendre davantage le positionnement des intellectuels des Lumières, regarder le téléfilm Voltaire et l’affaire Calas qui retrace l’engagement de Voltaire dans une bataille juridique accusant un père protestant d’avoir tué son fils.