La double énonciation
Une des particularités du théâtre est le phénomène de double énonciation. En effet, sur une scène de théâtre, il y a deux niveaux d’énonciation, c’est-à-dire deux instances différentes à qui l’on s’adresse.
Il y a d’abord une première instance sur la scène : lorsque le personnage A s’adresse au personnage B. Il s’agit du premier niveau d’énonciation.
Il y a ensuite une deuxième instance, de la scène à la salle : lorsque le personnage A parle au personnage B, le personnage B l’écoute mais également le public dans la salle. Le deuxième niveau d’énonciation c’est donc quand le personnage A s’adresse également au public.
Ce phénomène de double énonciation est ainsi présent en permanence au théâtre.
Composantes du texte théâtral : didascalies et paroles
I. Les didascalies
Une didascalie est une indication scénique destinée à la représentation. La didascalie n’est donc pas dite par les personnages mais est seulement écrite en italique par l’auteur. La didascalie donne des renseignements sur le jeu des personnages, sur les mimiques, sur leurs gestes, sur leurs déplacements, etc. Elle peut également renseigner sur le décor, sur le lieu, sur l’époque de la scène.
Dans une pièce de théâtre la longueur des didascalies peut être très variée. On dit souvent que la longueur des didascalies est proportionnelle à la liberté du dramaturge. C’est seulement au XXe siècle que les auteurs de théâtre se sont de plus en plus libérés et ont exprimé leurs choix et désirs de jeu scénique et de mise en scène. Il existe ainsi des textes de théâtre du XXe siècle où l’on trouve davantage de didascalies que de répliques.
II. Les paroles du personnage
A. Les types de parole
Il y a différents types de parole qu’il faut être capable d’identifier :
– Le dialogue : il est composé de répliques, une réplique correspondant à chaque fois qu’un nouveau personnage prend la parole.
– La stichomythie : il s’agit d’un genre de dialogue très particulier, où chaque réplique est composée de deux ou trois mots maximums, qui fusent. Cela donne un effet de tension, très souvent employé lors des scènes de disputes, de conflits.
– La tirade : il s’agit d’une réplique très longue, qui fait en général plus d’une quinzaine de lignes. Souvent, les tirades sont utilisées pour livrer une argumentation.
– Le monologue : c’est la même chose qu’une tirade, à la différence que le personnage est seul sur scène. On parle de monologue narratif lorsque le personnage seul sur scène parle d’un événement de sa vie, et de monologue délibératif lorsque le personnage ne raconte rien mais analyse une situation qui lui est souvent problématique, pèse les pour et les contre. Les monologues délibératifs sont en effet souvent le traitement par le personnage d’un dilemme.
– L’aparté : ce n’est pas une didascalie, mais une réplique du personnage qui s’adresse uniquement au public. On parle ici de convention puisque les personnages autour de celui qui prononce l’aparté font comme s’ils ne l’entendaient pas. L’aparté rompt ainsi l’illusion théâtrale puisque le personnage s’adresse directement au public.
B. Volume de parole et rapport de force
Le volume de parole de chacun des personnages traduit le rapport de force entre les personnages. Le théâtre est en effet un art de la parole, et il faut donc être attentif à la distribution de la parole : qui parle le plus ? En règle générale celui qui parle le plus est celui qui domine, mais il arrive qu’un personnage parle beaucoup pour ne rien dire. Au contraire, un personnage peut parler très peu mais dire des choses essentielles, et dans ce cas, c’est lui qui domine.
Organisation et structure d'une pièce
I. Le texte
Une pièce de théâtre se divise en actes, qui eux-mêmes se divisent en scènes.
II. L’intrigue
L’intrigue est divisée en différents moments dans une structure qui correspond exactement pour le roman au schéma narratif.
A. L’exposition
L’exposition correspond aux premières pages de la pièce de théâtre. La scène d’exposition a deux rôles principaux : un rôle informatif et un rôle plaisant. L’exposition doit informer le spectateur sur l’intrigue, sur l’identité des personnages, sur leurs liens, sur le lieu ou encore sur l’époque. La scène d’exposition doit plaire au spectateur afin qu’il ait l’envie de rester dans la salle.
B. Le nœud
Il s’agit du centre de l’intrigue, le moment où l’on comprend quel est le problème, problème qu’il faudra ensuite résoudre.
C. Les péripéties
Les péripéties font avancer l’action pour résoudre le nœud. Les péripéties peuvent accentuer la tension dramatique : il y a un nouveau problème qui vient complexifier la situation. Les péripéties peuvent autrement relâcher la pression dramatique, amenant des éléments de résolution. Lorsque la péripétie est particulièrement surprenante, on parle de coup de théâtre. Il s’agit d’une scène dans laquelle la situation est totalement renversée par rapport à la situation attendue.
D. Le dénouement
Il s’agit des dernières pages. Le dénouement conclue l’intrigue et résout le problème.
III. Des scènes typiques
Il existe des scènes un peu clichées, que l’on retrouve régulièrement et qu’il faut savoir reconnaître :
– La scène de séduction.
– La scène de confrontation : il s’agit d’une dispute, d’une bataille entre plusieurs personnages.
– La scène d’opposition.
– La scène de révélation : il s’agit d’une scène dans laquelle des personnages révèle un secret.
– La scène de coup de théâtre.
Les personnages du théâtre
I. Hiérarchie
Il faut distinguer les différents personnages du théâtre. Il y a tout d’abord le protagoniste : il s’agit du personnage principal. Il n’y en a en général au théâtre qu’un seul, il n’y a qu’un seul héros.
Tous les autres personnages sont des personnages secondaires. On trouve souvent la figure du confident, très répandu dans le théâtre classique. Le confident est l’équivalent de l’adjuvant dans le roman, il s’agit de quelqu’un qui écoute le personnage principal et l’aide.
On trouve enfin les figurants. Il s’agit des personnages les moins importants, qui simplement occupent le plateau.
II. Sortes de personnages : mécanisme d’identification ou rejet
Souvent l’auteur essaie avec ses personnages de provoquer soit en mécanisme d’identification, lorsqu’on apprécie le personnage, quand il s’agit de quelqu’un de bien ; soit au contraire de provoquer un rejet, lorsqu’il s’agit d’un personnage mauvais. On peut lister plusieurs catégories de personnages :
– Les personnages-types : il s’agit de personnages avec des traits exacerbés et simplifiés. On trouve ainsi au théâtre des figures de personnage-type qui reviennent régulièrement, par exemple celle du vieillard mauvais très présente dans le théâtre classique ou celle du valet rusé, ou encore celle du héros sublime, romantique et tourmenté.
– Les personnages mythiques : il s’agit de héros extraits de la mythologie grecque et latine, et qui portent dans leur réécriture tout leur passé. Don Juan par exemple.
– Les personnages individualisés : il s’agit de ceux qui ressemblent le plus à des personnes réelles. Ce sont des individus autonomes, avec leurs propres caractéristiques, leurs propres ambiguïtés. On ne trouve plus de stéréotypes dans ces personnages.
– Les personnages du nouveau théâtre : les personnages au XXe siècle du nouveau théâtre se vident de leur personnalité, n’ont plus de caractère propre, et se résument à une coquille vide.
III. Les relations entre les personnages
Il est important dans un extrait de théâtre d’analyser le statut et les relations des personnages entre eux. Cela permet de comprendre la dynamique de l’intrigue. Pour les analyser, on peut employer le schéma actanciel.
Il faut penser à une relation très présente au théâtre, le couple dominant/dominé. Par exemple le couple maître/valet, parent/enfant ou encore mari/femme.