Impacts écologiques des choix de productions et de consommations alimentaires
Les produits issus de l’agriculture n’ont pas les mêmes besoins et n’ont pas les mêmes coûts en termes énergétiques et environnementaux.
I. Besoin en eau
On étudie les besoins en eau ou en surface de sol pour produire 1 kg de bœuf, de poulet et de légumes. On observe aussi les émissions de gaz à effet de serre pour la production de ces mêmes produits. Si on est en unité arbitraire (UA), on observe que pour produire 1 kg de bœuf, il faut trois fois plus d’eau ou de surface de sol que pour produire 1 kg de poulet. Cette quantité est encore très importante par rapport à ce dont les légumes ont besoin pour être cultivés. En termes de gaz à effet de serre émis, pour produire 1 kg de bœuf on émet l’équivalent d’un trajet de 70 km parcourus en voiture. 1 kg de poulet est l’équivalent d’un trajet de 15 km. Pour 1 kg de légumes, c’est quasi-négligeable.
On constate ainsi que pour produire de la viande, on consomme beaucoup d’eau, beaucoup de surface de sol et on émet beaucoup de gaz à effet de serre.
II. Rendement
Il existe plusieurs types de définition du rendement en matière agricole. Ici, on utilise la quantité de matière ingérée sur la quantité de matière produite par le consommateur de cette matière. Le consommateur peut être l’homme. Pour 1 kg de céréales consommées, si l’homme les consommait directement, il produirait 10 g de tissus humains. En revanche, si ce même kilo de céréales est consommé par le bœuf, alors le bœuf produit 140 g de viande de bœuf, et si ces 140 g de viande sont consommés par un homme, il ne produira que 5 g de tissus humains.
On constate donc qu’en rajoutant un chaînon à la chaîne alimentaire, le rendement diminue, passant de 1 % à 0,5 %. La consommation de végétaux apporte un plus grand rendement en termes de production de matière à l’homme que la consommation de viande.
III. Élevage
La place occupée par l’élevage à la surface de la Terre correspond à 30 % de la surface de la Terre et à 70 % des surfaces agricoles. On retrouve le fort besoin de surface au sol pour la production de viande.
Si une partie de ces surfaces agricoles étaient reconverties pour produire des végétaux (légumes, céréales, etc.) étant donné que le rendement est plus important pour les végétaux, on pourrait produire plus d’aliments, et nourrir une plus grande partie de la population.
IV. Développement économique
Lorsqu’un pays s’enrichit, passant de la pauvreté au développement, alors la consommation de viande augmente énormément. En France, elle est passée de 15 kg par personne et par an à la fin du XIXe siècle à aujourd’hui environ 75 kg par Français et par an.
Conclusion : Tous ces arguments militent en faveur d’une limitation de la consommation de viande. En effet, cela est un enjeu de développement durable. Le développement durable est la capacité de la population humaine à subvenir à ses besoins sans compromettre la capacité des générations futures à subvenir elles-mêmes à leurs besoins. Autrement dit, c’est produire suffisamment aujourd’hui sans utiliser les réserves qui pourront servir dans le futur. Il serait intéressant donc de limiter la consommation de viande pour des raisons écologiques, et aussi pour des raisons de santé publique car l’excès de viande, et particulièrement de viande rouge, est néfaste.
La recherche des rendements et de la qualité dans la production alimentaire
On part du constat qu’il y a 7 milliards d’êtres humains sur Terre et que nous serons environ 9 milliards à l’horizon 2050. Il y a donc un défi pour nourrir tous ces êtres vivants. Pour l’agriculteur dont le métier est de produire des matières animales ou végétales, il y a un objectif : améliorer ses rendements mais aussi la qualité de ses produits. Depuis les années 1950, on cherche à améliorer les rendements par différents moyens, tous basés sur le concept d’agriculture intensive.
I. L’agriculture intensive
A. Améliorer les rendements
Pour améliorer les rendements, on a mis au point des engrais de plus en plus performants pour nourrir les plantes qui poussent dans les champs. Cela a pour objectif de nourrir une plus grande partie de l’Humanité. En effet, au niveau d’un agrosystème, l’export des matières cultivées comme l’export de céréales, conduit à un appauvrissement des sols. Quand elles poussent, les plantes puisent des minéraux dans le sol, et quand on les exporte, ces minéraux disparaissent du système agricole. Ces engrais sont donc enrichis en azote, phosphore et potassium. Ils viennent renourrir la Terre.
Par ailleurs, on a mis au point un certain nombre de pesticides, c’est-à-dire tous les produits chimiques visant à se débarrasser des nuisibles et qu’on épand sur les cultures. Ils comprennent les herbicides contre les mauvaises herbes, les fongicides contre les champignons et les insecticides contre les insectes. L’ensemble de ces produits prend aussi le nom de produits phytosanitaires car ils sont censés améliorer la santé de l’espèce végétale cultivée dans l’agrosystème.
Enfin, au niveau de l’élevage, on a mis en place l’élevage intensif (par exemple les poulets en batterie) avec des nourritures spéciales pour tel ou tel type d’élevage, pour produire un maximum de viande dans un minimum d’espace et en un minimum de temps.
B. Améliorer les variétés
Par ailleurs, on a cherché à améliorer les variétés agricoles. De tout temps, l’homme a essayé de sélectionner et hybrider les végétaux. On a mis au point des techniques d’hybridation scientifiquement plus précises afin de produire des variétés les plus performantes possible pour résister au vent, au froid, aux maladies, aux nuisibles. L’hybridation et la sélection peuvent éventuellement se faire au niveau de l’agrosystème, c’est-à-dire que l’agriculteur peut faire se reproduire telle espèce avec telle autre, que ce soit des animaux ou des végétaux, pour donner une troisième variété.
Il faut les distinguer de la production des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) qui se fait uniquement en laboratoire. Pour produire un OGM, on travaille au niveau de l’ADN. Chez une espèce, on sélectionne un gène intéressant et on le transfert chez une autre espèce. Par exemple, on a transféré des gènes de certaines bactéries à des végétaux pour les rendre résistants aux nuisibles. Par exemple, le maïs a été rendu résistant à certains de ses prédateurs, comme la pyrale, une chenille de papillon. Avec les OGM, on obtient donc des espèces que l’on veut plus résistantes et donc plus performantes.
II. Les impacts de l’agriculture intensive
Cette recherche de l’amélioration des rendements et des variétés agricoles a un certain nombre d’impacts qui sont devenus plus importants et plus prégnants à partir de la fin du XXe siècle et de nos jours.
A. L’impact environnemental des pratiques culturales
L’utilisation des intrants (pesticides, herbicides, engrais, etc.) amène à une pollution forte des sols. En effet, ces molécules ont une durée de vie très longue et persistent dans le sol qui est donc pollué. Il y a également une pollution des eaux, puisque quand les engrais sont apportés en quantité trop grande pour être utilisés par les plantes, ils restent au sol et gagnent les nappes phréatiques quand les pluies s’infiltrent dans le sol. Il y a donc une pollution des eaux de surface et des eaux de profondeur par ces molécules chimiques à durée de vie très longue et qui ne sont pas biodégradables.
Le problème est que ces molécules ont un impact sur la biodiversité dans l’agrosystème que l’on étudie. Par exemple dans un champ de maïs, on cherche à détruire des insectes ravageurs. Mais étant donné que les produits sont transportés dans les sols et dans les eaux en dehors de l’agrosystème, la biodiversité s’en trouve réduite aux alentours des agrosystèmes.
Enfin, il y a une détérioration des écosystèmes, notamment à cause du lessivage des sols. Dans un champ, les sols sont maintenus presque nus dans les différents plants de maïs. Or, des sols nus sont plus fragiles et sont abimés lorsque les eaux de pluie ruissellent à leur surface.
L’ensemble des techniques liées à l’agriculture intensive a donc mené à un poids environnemental lourd que l’on cherche aujourd’hui à contrecarrer.
B. L’impact sanitaire
Par ailleurs, il y aussi un impact sanitaire sur les populations humaines. La notion de bioconcentration est le fait qu’une molécule chimique qui peut être nuisible pour la santé humaine se concentre au fur et à mesure de la chaine alimentaire. Quand nous consommons un poisson qui a consommé des polluants dans l’eau, nous concentrons les polluants dans notre corps. Au fur et à mesure, cette concentration est de plus importante et peut amener à des maladies dans des espèces animales et chez les hommes.
Un autre phénomène important est la résistance aux antibiotiques. Des antibiotiques sont utilisés en très grandes quantités dans certains élevages (notamment les élevages intensifs) car comme ils sont concentrés, ils sont susceptibles d’être ravagés par des bactéries. Or, en utilisant trop d’antibiotiques, les bactéries ont tendance à développer des résistances. Or, comme souvent les bactéries qui attaquent les animaux sont souvent les mêmes que celles qui attaquent les hommes, on ne sait plus se défendre face à elles.
Enfin, un ensemble de maladies, allergies, voire cancers serait liés à l’utilisation d’intrants chimiques dans l’agriculture. Ces maladies touchent à la fois la population qui consomme les produits, mais aussi en premier lieu les agriculteurs qui les touchent avant de les épandre dans leur champ.
Conclusion : Il existe un certain nombre de solutions qui se sont de plus en plus nombreuses aujourd’hui. Une des solutions seraient de limiter l’agriculture intensive, et notamment d’essayer de réduire l’utilisation des intrants, tous ces produits chimiques ayant un impact environnemental et un impact sanitaire important. Au niveau économique, pour les agriculteurs, utiliser moins d’intrants peut être plus intéressant car cela réduit leurs achats. Certains basculent même vers une agriculture biologique, où ils n’utilisent pas du tout d’intrants. Il y a un certain coût au moment de la transition, mais aussi des bénéfices ensuite puisque les produits biologiques étant meilleurs pour la santé, ils rapportent plus à l’agriculteur qui les vend.
Les intrants et leurs impacts environnementaux et sanitaires
I. Carences végétales
Pour savoir ce que l’agriculteur a besoin d’apporter, il faut connaître précisément ce dont a besoin une plante pour se développer. Une carence est un manque, et expérimentalement on peut priver une plante de certains éléments, notamment de minéraux et observer les conséquences que cela peut avoir. On peut observer cela facilement au niveau des feuilles.
Exemple : un rameau est représenté, avec des feuilles âgées plus grandes en bas et des feuilles jeunes en haut. Les feuilles en bonne santé sont vertes vives, et les feuilles en mauvaise santé peuvent jaunir, brunir ou rougir, devenir plus molles ou au contraire plus rigides, ou même tomber.
Les plantes ont besoin principalement de trois minéraux :
– L’azote, N : lorsqu’une plante est privée d’azote, elle peut développer une maladie appelée Chlorose, c’est-à-dire un manque de chlorophylle (voir photos ci-dessous). En effet, l’azote est principalement stocké dans la chlorophylle, qui permet aux végétaux de réaliser la photosynthèse.
– Le phosphore, P : lorsqu’une plante manque de phosphore, elle va rougir ou brunir et être plus rigide qu’une plante normale.
– Le potassium, K : une feuille qui manque de potassium devient brune sur les côtés alors qu’elle peut rester verte au centre.
– Les jeunes feuilles ont aussi besoin de souffre, de fer, de calcium, etc.
Expérimentalement, on peut donc étudier les carences des plantes et ces connaissances sont utilisées par les agriculteurs pour leur champ.
II. Intrants
Pour pousser, un champ a besoin d’un apport en éléments minéraux. Ces plantes puisent dans les réserves du sol les minéraux dont elles ont besoin, principalement, l’azote, le potassium et le phosphore.
Cette réserve du sol est entretenue par deux éléments :
– Les imports naturels, notamment grâce aux précipitations qui contiennent des éléments naturels.
– Les intrants : tout ce que l’agriculteur apporte.
Ces imports sont absorbés par les végétaux et une fois que ceux-ci ont grandi, il y a un export de la plupart de la production lors de la récolte, cela appauvrit le sol en éléments minéraux (car ils étaient contenus dans les végétaux).
Ces réserves du sol peuvent aussi être appauvries par pertes de lessivage. Le lessivage a lieu lorsque les eaux (la pluie) emportent les éléments du sol vers les nappes phréatiques.
Il y a donc des imports et des exports et une partie des végétaux non récoltée : les racines ou les restes de tiges (les chaumes) sont restitués au sol.
Les intrants sont tout ce qu’utilise l’agriculteur pour obtenir sa production : les semences, les énergies fossiles, les engrais et les pesticides (produits de synthèse utilisés pour faire pousser les plantes mais également pour en obtenir plus sur des parcelles limitées).
III. Impacts des intrants
Les molécules de synthèse utilisées ont des impacts sur la santé et l’environnement, il peut y avoir :
– Une pollution du sol, si ces molécules de synthèse ne sont pas utilisées par les plantes et s’accumulent dans les réserves du sol.
– Une pollution de l’air, au moment de l’épandage des engrais.
– Une pollution de l’eau, si les engrais s’infiltrent ou sont emportés au moment du lessivage dans les nappes phréatiques.
– Un appauvrissement chronique : plus on apporte d’intrants, plus on produit en grande quantité et plus on exporte de matière minérale à l’extérieur de l’agrosystème.
Conclusion
Il y a un cercle vicieux entre les intrants et l’appauvrissement du sol. Plus on apporte, plus on produit et plus on produit, plus on appauvri le sol.
Dans ce modèle d’agriculture intensive, on apporte beaucoup d’éléments extérieurs pour obtenir, dans un espace limité, un rendement le plus important possible. Cela passe par l’utilisation de produits de synthèse qui peuvent être dangereux à la fois pour l’environnement et pour la santé (de l’agriculteur qui les utilise et des consommateurs puisque ces produits se retrouvent en partie dans les végétaux récoltés).
C’est la raison pour laquelle de plus en plus d’agriculteurs et de consommateurs plébiscitent une agriculture moins intensive, qui utiliserait moins d’intrants et surtout moins de molécules de synthèse potentiellement dangereuses pour l’environnement et la santé.